9 mai 2017

Douance et perfectionnisme - Dabrowski -

Le perfectionnisme constitue une force puissante qui peut immobiliser ou devenir source d’énergie, suivant la manière dont est mobilisée l’attention. Les perfectionnistes ont des critères personnels très élevés et ne pas les atteindre peut être cause de grande peine. Ils sont alors assiégés par la honte et la culpabilité, ce que peu de personnes peuvent comprendre. Même lorsqu’ils sont félicités, ils se sentent souvent misérables, conscients de leur éloignement par rapport à leurs aspirations. Ils ont l’impression de mystifier les autres en n’utilisant pas pleinement leurs capacités. Ceux qui s’auto-critiquent ainsi en permanence ne sont jamais satisfait et sont à l’origine de la mauvaise presse du perfectionnisme.

Les surdoués visent souvent des valeurs irréalistes, se battent contre des moulins à vent, persistent quand les autres abandonnent et envisagent les possibilités même face à l’imminence d’une catastrophe. Ils se poussent à dépasser le caractère raisonnable de leurs propres limites pour atteindre leur but, ce qui leur semble important. Cet idéalisme, alors même qu’il semble incompréhensible pour un observateur extérieur, porte en lui le potentiel de changer le monde. La douance et le perfectionnisme sont des âmes-sœurs. Le perfectionnisme est un concept abstrait. Il nécessite un esprit abstrait afin de l’appréhender et de caresser l’idée d’une vision qui n’existe pas dans ce monde concret – aspirer à ce qui devrait être. La facilité par rapport à l’abstraction constitue un sine qua non de la douance.

Le développement asynchrone des surdoués engendre le perfectionnisme. Les enfants précoces ont des standards qui correspondent à leur âge mental et non à leur âge biologique. Dès leur plus jeune âge, les enfants surdoués possèdent des capacités cognitives leur permettant de prédire leurs actions ; de fait, ils ont plus de chance que les autres enfants de réussir dès leurs premières tentatives et d’éviter les échecs, quelle que soit la difficulté. L’école exacerbe les tendances perfectionnistes des enfants précoces. En donnant le même travail aux enfants, sans tenir compte de leurs capacités, on habitue l’enfant surdoué à avoir toujours les meilleures notes, ce qui peut entraîner une dépendance aux meilleures notes. Le manque de challenge et de stimulation peut aussi entraîner un autre type de perfectionnisme. Si le travail scolaire est trop facile, certains enfants chercheront à corser la difficulté, jusqu’à atteindre ce qu’ils estiment être la perfection. Il n’y a aucune joie à maîtriser rapidement ce que d’autres mettent un temps long à apprendre. Des compensations, comme les meilleures notes ou des récompenses sont alors recherchées et conduisent à un perfectionnisme négatif.

Dans le contexte de la théorie de Dabrowski, le perfectionnisme prend une nouvelle signification. Dans les bas niveaux de développement, il s’agit d’une distorsion du désir d’auto perfection. Au service du développement cela devient une force conductrice qui imprègne la vie de l’individu de hautes valeurs. Le perfectionnisme se manifeste par de l’insatisfaction vis-à-vis de ce qui est et par une aspiration envers ce qui devrait être. Il y a une conviction intime qu’il y a davantage dans la vie que la banalité, un désir de donner du sens à sa vie en donnant le maximum de soi.